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Les pianos de la double intégrale des Valses

Deux pianos appartenant à des mondes bien différents, que 180 années séparent...

En plus de 20 ans de concerts et de masterclasses pendant lesquels j’ai confronté les œuvres de Chopin tant aux pianos historiques qu’aux pianos modernes, j’ai constaté à quel point l’instrument d’époque obligeait à une relecture attentive et minutieuse du texte. Que ce soit pour la gestion de la dynamique, de la polyphonie ou de la pédale forte, tout est différent. Par sa nature même et sa puissance limitée, le piano des années 1840 oblige à la retenue et exige davantage de subtilité dans la gradation sonore. Par ailleurs, la vélocité qu’autorise sa mécanique, bien que réelle, n’égale pas celle du piano moderne. Enfin, la longueur de son des notes tenues autorise des Tempi différents et favorise le Bel canto.

Le piano moderne tel qu’on le connaît aujourd’hui est apparu aux Etats-Unis dans la seconde moitié du XIXème siècle, fruit des recherches des facteurs de piano désireux de fournir aux pianistes des instruments beaucoup plus puissants et résistants, aptes à lutter avec l’orchestre et à remplir les grandes salles modernes. Alors que le piano de l’époque de Chopin n’était destiné qu’au salon, le piano moderne né de l’engouement du public pour la formule du récital créée par Liszt, devait affronter une autre échelle sonore. Cadre en fonte pleine, longueur de cordes, mécanique lourde, tout dans le piano moderne tend vers l’obtention d’un son riche, égal et puissant.

Toutes ces différences auraient pu me conduire à choisir d’enregistrer ces valses sur un piano d’époque. J’ai préféré confronter deux versions : l’une sur instrument historique et l’autre sur piano d’aujourd’hui. Le but n’étant pas d’opposer deux lectures en cherchant à convaincre que l’une est meilleure que l’autre, mais plutôt de montrer tout le bénéfice que l’on peut tirer de l’adaptation au piano moderne des réflexions nées de l’utilisation du piano d’époque. Pour cette confrontation passionnante, j’ai choisi deux instruments d’exception : un Pleyel de 2,27 mètres, n° 5612, sorti des ateliers du facteur parisien le 17 avril 1837 et un des nouveaux pianos de concert Carl Bechstein de 2,82 mètres, sorti de la fabrique du facteur berlinois en 2020, n° 215 250.

PLEYEL.jpg

PLEYEL 1837
2,27m, 6 octaves 1/2, mécanique à simple échappement
finition acajou pommelé à double rubans de cuivre
vernis au tampon
Date de sortie de la fabrique Pleyel : 17 avril 1837
Premier acquéreur : Mademoiselle Nicole à Paris
Date d’achat : juin 1839
Prix de vente en 1839 : 3000 francs or
Particularité : chevalet à double étage
Etat actuel : restauration complète en 1999

Exceptionnel à plus d’un titre, ce piano à queue (propriété de la ville de Croissy) n’en finit plus d’étonner ceux qui l’entendent. La richesse des couleurs qui peuvent être tirées de cet instrument permettent de mieux comprendre l’exclusivité que Chopin leur consacrera, tant pour ses concerts, que pour ses compositions. Depuis sa restauration complète en 1999, ce piano a participé depuis à plus d’une centaine de manifestations différentes autour de Chopin et permis de faire progresser l’interprétation des œuvres du compositeur en donnant accès à un univers sonore que l’on croyait disparu. Jouer sur cet instrument demande une grande pratique car la mécanique à simple échappement exige une attention particulière de tous les instants ! En échange, il procure la sensation unique d'ouvrir l'inspiration de l'interprète à un monde de sonorités infinies, confirmant ainsi la phrase écrite par Frédéric Chopin à propos des pianos d'Erard et de Pleyel : « Quand je suis un peu fatigué, je prends le piano d’Erard car le son est tout fait, mais quand je suis en forme, alors je prends le piano de Pleyel car je peux faire ma propre sonorité. » Cet instrument est exposé en permanence au Salon romantique du Château Chanorier à Croissy sur Seine où il fait partie de la collection de l'association Piano Pleyel Chopin de Croissy.

(www.pianocroissy.com)

BECHSTEIN.jpg

Modèle : D 282
Numéro : 215 250
Durée de fabrication : 15 mois
Sortie d'atelier : 2020
Longueur : 2,82 mètres
Poids : 521 kilos
Table d'harmonie : épicéa du Val di Fiemme, dans les Dolomites
Nombre de touches : 88
Finition : laqué noir vernis

Le grand piano de concert D 282 utilisé dans cet enregistrement est l'un des derniers modèles de la célèbre firme berlinoise. Je l'ai choisi pour cet enregistrement en raison de la chaleur et de la finesse de sa sonorité, mais aussi des capacités exceptionnelles de sa mécanique à répondre aux moindres sollicitations du toucher. Il offre ainsi dans ce répertoire particulier des caractéristiques qui permettent d'infinies subtilités dans l'organisation du discours musical, rejoignant en cela certains aspects du piano de l'époque romantique tout en donnant accès à une échelle de dynamiques sonores plus étendue.
Plus d'informations sur ce modèle sur le site www.bechstein.com

Pour en savoir plus sur les instruments joués par YVES HENRY, n'hésitez pas à le(la) contacter.

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Pianos de la double intégrale: Instruments
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